Rapport social de sexe (3) : résistance féministe

image 3 Si on résume les deux articles précédents pour bien mettre en évidence ce que nous avons acquis jusqu’ici, nous constatons que les rapports sociaux de sexe peuvent prendre les formes les plus diverses tant qu’ils ne sont pas contraints par l’apparition de rapports sociaux de production forts et par des rapports de classes. Ils perdent leur autonomie quand ils sont imbriqués à ces autres rapports sociaux. Alors, la domination masculine s’installe ou s’aggrave. Les rapports sociaux de sexe évoluent au cours de l’histoire avec l’ensemble des rapports sociaux mais toujours avec un retard de telle sorte qu’il reste des traces de rapports féodaux dans les rapports de sexe quand la société capitaliste s’installe. Quand les rapports sociaux se modifient, les femmes entrent généralement dans les nouveaux rapports en situation d’infériorité et ne trouvent à s’y intégrer qu’avec retard. La sphère sociale réservée aux femmes est toujours la plus étroite. Dans les campagnes les femmes sont restées plus longtemps qu’ailleurs prisonnières de rapports sociaux précapitalistes (ne pouvant pas disposer d’elle-même ou même de leur temps). De cela découle des conséquences qu’il s’agit de développer maintenant.

L’être social des femmes est toujours marqué dans les sociétés de classe par les formes de domination les plus inégalitaires ; il accuse un retard sur celui des hommes. Le plus souvent les femmes acceptent et intériorisent leur statut social inférieur. De là vient sans doute que les femmes paraissent souvent plus conservatrices, plus attachées aux pratiques religieuses, moins tournées vers le domaine public et l’action politique. On ne peut pas dire que les femmes sont dominées parce qu’elles seraient moins enclines à s’affirmer, qu’elles sont moins agressives. La personnalité féminine est modelée par les rapports de domination plutôt qu’elle en est la cause. Le sexe féminin est sans doute moins agressif pour des raisons physiologiques mais cela ne se traduit par une situation de sujétion que pour autant que les rapports sociaux le favorisent.

Comme les autres rapports sociaux, l’organisation du rapport social de sexe est passé du religieux au juridique c’est-à-dire d’un système s’appuyant sur l’évocation d’une autorité transcendante à un système émanant d’une autorité humaine. Depuis le début du 19ème siècle, les rapports sociaux entre sexes et concrètement le statut des femmes est de plus en plus réglé par le droit. L’influence de la religion se maintient sur les mœurs (effectivement pratiqués) mais la domination cherche à s’imposer ou se maintenir par le biais du droit. Le droit est donc l’expression de la norme (des mœurs reconnus et revendiqués) qui organise le rapport social de sexe. En conséquence, comme pour les autres rapports sociaux, c’est dans la forme du droit et comme revendication du respect d’un droit fondamental, d’un droit conforme à la pleine dignité humaine, que les aspirations féminines sont invitées à s’exprimer. La discrimination est produite de manière directe ou indirecte par les lois, et c’est par des lois qu’elle demande à être levée. Cependant, le retard historique dans le développement du statut de la femme se retrouve dans l’apparition de revendications féministes. Ce n’est qu’au vingtième siècle que s’est développé un mouvement féministe véritablement organisé et susceptible de toucher les couches populaires. Encore ne s’est-il affirmé d’abord que dans les couches sociales les plus favorisées et n’atteint que très progressivement et avec beaucoup d’obstacles les femmes qui subissent le plus durement les autres rapports sociaux (de classe, de race etc.).

image 1Les mouvements féministes restent faibles. Ils concernent surtout les femmes les plus éduquées des zones urbaines des pays développés. Cela se comprend aisément : globalement, on constate empiriquement que dans un rapport social, la partie dominée est la moins consciente. C’est par le rapport social que se forge la conscience de l’appartenance à un groupe (et par extension et abstraction à l’humanité) mais les études sociologiques démontrent que cette conscience est plus vacillante dans le groupe dominé, qu’elle est marquée par les espérances et le poids de la mémoire et surtout qu’elle est travaillée par l’idéologie dominante. Dans le rapport de classe, la classe dominante est moins nombreuse mais plus organisée socialement, plus solidaire et a une conscience plus claire de sa spécificité. Cela est vrai également dans le rapport social de sexe : dans toutes les sociétés, les hommes sont solidaires dans leur domination et ne doutent pas de leur bon droit. Bien rares sont les hommes à avoir agi ou écrit contre l’oppression masculine (l’inverse remplirait des volumes). On peut citer Montaigne qui affirmait en 1588 que « les femmes n’ont pas tort du tout quand elles refusent les règles de vie qui sont introduites dans le monde, d’autant que ce sont les hommes qui les ont faites sans elles ». Au 17ème siècle le philosophe cartésien Poulain de la Barre a écrit un traité « de l’égalité des deux sexes » dans lequel il faisait ce constat : « Et dans ce qui concerne la condition présente des femmes, on aurait reconnu qu’elles n’ont été assujetties que par la Loi du plus fort ». Encore faut-il bien mesurer les limites de la solidarité féministe de Poulain de la Barre : selon Michèle Le Doeuff, elle ne vaut que pour les femmes adoptant le cartésianisme (Michèle Le Doeuff : « le sexe du savoir » Champs Flammarion – Aubier 1998). Pour le 18ème siècle et la période révolutionnaire, on ne peut citer que Condorcet. En 1790, dans son article « L’admission des femmes au droit de cité », il écrit : « … les droits des hommes résultent uniquement de ce qu’ils sont des êtres sensibles susceptibles d’acquérir des idées morales, et de raisonner sur ces idées ; ainsi les femmes ayant ces mêmes qualités, ont nécessairement des droits égaux. Ou aucun individu de l’espèce humaine n’a de véritables droits, ou tous ont les mêmes ; et celui qui vote contre les droits d’un autre, quelle que soit sa religion, sa couleur ou son sexe, a dès lors abjuré le sien ». Il faut attendre le 19ème siècle pour trouver quelques auteurs traitant favorablement de la condition féminine : John Stuart Mill rédige l’essai « de l’assujettissement des femmes » et, à la Chambre des Communes, défend le droit de vote des femmes. Charles Fourier met en relation la situation des femmes et celle de la liberté publique, il écrit : « En thèse générale : les progrès sociaux et changements de période s’opèrent en raison du progrès des femmes vers la liberté ; les décadences d’ordre social s’opèrent en raison du décroissement de la liberté des femmes ».  Le mouvement Saint-Simonien s’adresse aux femmes et en compte quelques-unes chargées de la propagation de la doctrine, mais il s’en sépare et les exclut de sa hiérarchie quand il opère un tournant religieux sous la direction du « Père » Enfantin. Georg Simmel écrit en 1890 un essai : « ce qu’il y a de relatif et ce qu’il y a d’absolu dans le problème des sexes ». Pour les débuts du socialisme, citons August Bebel et Engels.

image 2Du côté des femmes, celles qui ont défendu la cause de leur sexe sont encore plus rares et isolées et n’ont une réelle influence que tardivement. Pour le 17ème siècle, Michèle Le Doeuff nous fait connaitre Gabrielle Suchon (qui serait l’inspiratrice des idées du jeune J. J. Rousseau) et aurait été elle-même influencée par Christine de Pisan (15ème siècle) qui défendait l’éducation pour tous. Il y a évidemment Olympe de Gouge pour le 18ème siècle (avec les limites que nous avions notées). Citons Mary Wollstonecraft (la mère le Mary Shelley) et au 19ème siècle les Saint-simoniennes Marie-Reine Guindorf et Désirée Véret qui fondent ensemble en 1832 une petite brochure « la femme libre ». Dans l’effervescence de la période révolutionnaire, sur la base d’un rapport social fortement inégalitaire, se forge une conscience de soi féminine et s’exprime l’idée encore très isolée que « les femmes ne devront qu’à elles-mêmes leur émancipation définitive. Les hommes, pour vaincre les privilèges, ont fondé la Société des droits de l’homme ; eh bien, que les femmes fondent une société correspondante des droits de la femme […]. Elle fera sentir aux pouvoirs mâles que toute représentation nationale est incomplète tant qu’elle n’est que mâle » (Adèle de Saint-Amand). Après 1830 et jusqu’à la chute de l’Empire, les mouvements féministes restent confidentiels et sans effets. Le féminisme trouve un nouvel élan dans le socialisme et l’anarchisme avec Madeleine Pelletier, Alexandra Kollontaï, Flora Tristan et Louise Michel.

Le féminisme est certainement le seul mouvement émancipateur à ne s’être jamais exprimé que sous la forme de la revendication de droit. De ce point de vue, il vérifie notre thèse que lorsqu’un rapport social est vécu consciemment comme tel, la tension qui lui est inhérente est source de revendication sous forme d’affirmation de droits. Le féminisme a exprimé ses aspirations d’abord sous la forme d’un droit fondamental et d’une application véritable de l’universalité prétendue des droits de l’homme, puis au cours du 19ème et de plus en plus en plus au 20ème siècle sous la forme de la revendication de droits positifs et par la proposition de projets de lois. Dans ses périodes de recul, quand le conservatisme ne lui laissait aucun espoir, il a toujours maintenu la revendication du droit de vote comme étant la plus fondamentale et la clé de toutes les autres. Dans la première moitié du vingtième siècle, la question du droit de vote était la seule commune à toutes ses composantes. Il s’est heurté alors, en France au début de la troisième république, à l’obstination du parti Radical et aux préventions des syndicats corporatistes. Cela l’a obligé à être toujours concret, précis dans ses demandes et à les motiver toujours dans les termes convenus du droit, de l’idéologie républicaine et laïque et à insister toujours sur la question d’universalité des principes juridiques. Il a toujours eu à lutter contre la tendance à vouloir le ridiculiser, à l’accusation d’immoralité ; cela lui a interdit les utopies. Il a par conséquent toujours été un mouvement d’autant plus paradoxalement faible dans son audience qu’il était intellectuellement fort dans ses doctrines.

rapport social de sexe (2) : histoire d’une domination

image 1L’axe autour duquel s’organisent les mécanismes qui gouvernent les rapports entre les sexes, c’est la division sexuelle du travail (donc la forme sexuelle du rapport social le plus englobant : la division du travail). Il se caractérise par une constante universelle modulée par des variations ; la constante universelle, c’est la séparation sociale des sexes avec l’attribution aux seuls hommes des activités liées à l’exercice de la violence (guerre et chasse aux gros gibiers). La variation concerne en particulier les droits et les prérogatives économiques des femmes. Dans certaines sociétés, les femmes sont sous la coupe des hommes sur tous les plans ; dans d’autres sociétés, les femmes possèdent des positions économiques qui leur permettent de faire pièce au pouvoir masculin.

La division sexuelle du travail est une condition nécessaire de la domination masculine. C’est parce qu’ils maintiennent leur domination dans l’organisation économique et qu’ils se réservent le monopole de la force organisée, que les hommes assurent la persistance de leur autorité politique. Partout chaque sexe est plus ou moins astreint à des activités productives spécifiques et à fournir à l’autre sexe le produit de son travail. Les féministes sont donc fondées à remettre en cause cette division sexuelle du travail et à vouloir l’égalité partout mais d’abord dans ce domaine. Cette division se constate partout et dans toutes les sociétés quoique à des degrés divers. On la trouve toujours aussi loin qu’on remonte. Elle est peut-être un acquis lié à l’humanisation ou, selon certains, un acquis du paléolithique supérieur qui expliquerait le succès de l’homo sapiens sur Neandertal. Elle a aussi, au moins partiellement, une origine naturelle : maternité, musculature féminine plus faible etc. Il semble probable qu’une division des tâches s’est imposée dans les sociétés de chasseurs : aux hommes la chasse au gros gibier et la guerre, aux femmes la chasse au petit gibier, la cueillette et la cuisine quotidienne. Il est vraisemblable qu’un système de valeurs différentes se soit attaché à ces tâches. Là où les différences étaient manifestes, comment l’égalité aurait-elle pu être pensée ? C’est son contraire, l’inégalité, qui a été pensé. Ce n’est que dans les sociétés développées, où le travail requiert de moins en moins l’exercice de la force physique, que la question de l’égalité se pose avec une réelle acuité.

Les conséquences les plus originairement inscrites de la division sexuelle du travail sont partout les mêmes : le monopole des hommes sur les armes leur a donné un poids décisif sur les relations avec les groupes voisins. On ne connaît aucune découverte archéologique qui contredise l’existence d’une division sexuelle du travail ni qui infirmerait la règle selon laquelle ce sont les hommes qui détenaient la totalité ou l’essentiel des armes les plus létales. Pour Françoise Héritier, la domination masculine (qu’elle désigne comme « la valence différentielle des sexes), est l’effet « de mécanismes invariants sous-jacents… qui ordonnent le donné phénoménologique des sociétés et lui confèrent son sens », elle est donc quelque chose de structurellement fixé, destiné à toujours se répéter sous différentes formes. Pour elle, les sociétés ne peuvent être construites autrement que sur « cet ensemble d’armatures étroitement soudées les unes aux autres que sont la prohibition de l’inceste, la répartition sexuelle des tâches, une forme légale ou reconnue d’union stable et la valence différentielle des sexes ».

Partout les femmes ont eu tendance à devenir l’enjeu des stratégies masculines. Avant même que les hommes aient pu manipuler des richesses (un surplus social), ils manipulaient des droits sur les femmes. Les femmes ont ainsi toujours été en position de subir de manière défavorable les évolutions ultérieures. Lorsque la sédentarité et le stockage des productions sont devenus possibles, que les richesses ont commencé à être accumulées et utilisées, les rapports sociaux se sont diversifiés et complexifiés. L’exploitation économique s’est mêlée à l’oppression que les femmes subissaient déjà. Le modèle de société Iroquois (pris comme base d’étude par Morgan et Engels), modèle dans lequel les femmes avaient des droits économiques étendus et étaient « fort considérées », n’est ainsi sans doute pas un modèle primitif mais plutôt vraisemblablement le fruit d’une longue histoire et de circonstances favorables : la chasse et la guerre pouvaient éloigner les hommes pour de longues périodes.

image 3La vie sociale est toujours dominée par les hommes, que l’on se tourne vers les sociétés de classes de l’Antiquité occidentale (Grèce, Rome) ou orientale (Chine, Japon), vers les sociétés étatiques de l’Amérique précolombienne (Incas, Aztèques) ou les sociétés à castes de l’inde. Cependant, l’effet produit par le rapport social de production se fait sentir et influence le rapport de sexe et sa compréhension. La société grecque est essentiellement esclavagiste et aristocratique : être pleinement homme pour un grec, c’est d’abord être un homme et non une femme, être libre et non esclave, être athénien et non métèque. La femme grecque de condition « libre» est enfermée dans les liens du mariage dans la famille de son maître et époux, dont elle dirige en partie l’économie domestique. Le maître dispose à son gré de ses esclaves féminines en matière sexuelle. Sa relation à son épouse est marquée par ces autres rapports sociaux de domination. Aristote définit d’ailleurs clairement ces relations de sujétion lorsqu’il écrit dans La Politique : « Les parties primitives et indécomposables de la famille sont le maître et l’esclave, l’époux et l’épouse, le père et les enfants » et qu’il ajoute : «Hésiode a eu raison de dire que la première famille fut composée de la femme et du bœuf de labour. En effet, le bœuf tient lieu d’esclave aux pauvres ».

Ainsi, dès que s’impose un rapport social de classe, l’analogie entre structure de la famille et structure du mode de production se fait sentir. S’y fonde une double sujétion de la femme, dans la cité d’une part, dans la famille d’autre part. Il y a donc ici une particularité des rapports sociaux de sexe qui tient à ce qu’ils existent même en l’absence d’autres formes de clivage des sociétés. Ils peuvent prendre les formes les plus variées, tout en restant des formes de domination masculine, jusqu’à ce que les rapports de classe viennent leur imprimer leur marque.

La compréhension des sociétés primitives, puis des sociétés esclavagistes éclaire notre propre société : ce qui décide de la forme des rapports sociaux de sexe ou la laisse ouverte, c’est leur lien aux autres rapports sociaux ou l’absence d’un tel lien et, là où des rapports sociaux de classe existent, c’est la forme de ces rapports. Se confirme que la revendication du mouvement féministe moderne va bien au cœur du problème quand elle demande l’égalité dans tous les rapports de production comme dans tous les autres rapports. Elle se résume dans la formule : égalité des sexes. Mais peut-être faudrait-il mieux parler d’identité ou d’indifférenciation des rôles sociaux. Car, cette revendication est en fait celle que les rapports sociaux de sexe ne soient plus modulés par les autres rapports sociaux, en particulier par les rapports sociaux de classe, qu’il leur soit rendu une capacité d’évolution autonome donnant plus de droits et d’opportunités aux femmes. L’aspiration à l’égalité des sexes est un idéal dans lequel toute forme de division sexuée de la société aurait disparu. C’est une revendication totalement moderne dont on ne trouve aucun germe dans les sociétés précapitalistes. On a vu dans ces sociétés des femmes qui résistaient, qui se vengeaient des hommes en les faisant tuer, qui s’enfuyaient etc. ; on a vu des femmes agir collectivement pour se faire respecter, mais nulle part, dans aucune de ces sociétés, on a vu quiconque, homme ou femme, imaginer et revendiquer une égalité.

En Europe depuis le moyen-âge le statut des femmes a connu des évolutions contrastées liées à l’évolution générale des sociétés et des rapports sociaux. Aux 12ème et 13ème siècles, le processus d’urbanisation a créé des conditions favorables à l’intégration sociale des femmes. C’est à cette époque que s’invente le mythe de l’amour courtois, dans le midi de la France (plus urbanisé et influencé par la civilisation arabo musulmane). Selon Denis de Rougement (« l’amour en Occident »), avec « Tristan et Iseult » s’invente l’idée de l’amour absolu lié au basculement d’un ordre chrétien et féodal en un monde moderne influencé par l’orient. Alors que le monde féodal est brutal et inculte, apparaissent des seigneurs poètes. La thèse de Denis de Rougemont est que cela est lié au retour des chevaliers de la croisade. L’écrasement de l’hérésie Cathare (1209-1229) met fin à ce mouvement et rétablit les rapports sociaux féodaux.

Dès le 14ème siècle et au 15ème siècle, les femmes rencontrent de plus en plus d’obstacles à leurs activités. A la fin du 16ème, on a observé partout une détérioration du statut des femmes sous l’influence de la conjoncture démographique et économique, de certains facteurs politiques et des réformes protestantes et catholiques. Au 17ème siècle Molière ridiculise les femmes qui veulent s’émanciper. Même les Lumières restent hostiles aux droits des femmes ; l’Encyclopédie ne leur reconnaît qu’une demi citoyenneté : « On accorde ce titre [de citoyen] aux femmes, aux jeunes enfants, aux serviteurs que comme membres de la famille d’un citoyen proprement dit : mais ils ne sont pas vraiment citoyens ».

Après une nouvelle période d’amélioration progressive, la domination masculine (autorité maritale et paternelle) a été durablement renforcée par le Code Napoléon et ses imitations dans toute l’Europe. Le Code Napoléon maintien de fait pour les femmes la situation et les rapports de dépendance caractéristiques de la société féodale. Le Code Civil organise le mariage comme un contrat mais y maintient un rapport de sujétion personnelle de la femme. Son article 213 dit ou plutôt disait : « Le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari ». Le droit au divorce instauré par les lois de Septembre 1792, est limité par le Code Napoléon puis complètement supprimé en 1816. En 1884, il est rétabli dans ses conditions de 1804 ; il est libéralisé en 1908, restreint en 1941 pour être rétabli dans ses conditions de 1908 en 1945. Le divorce par consentement mutuel n’existe que depuis 1975. Le droit d’administrer les biens communs n’existe que depuis 1965.

image 2Jusqu’à la fin du 19ème siècle, la femme n’a ni la propriété de sa personne, ni la disposition de ses biens. L’ordre social et la hiérarchie familiale se confortent l’un par l’autre. En 1820, Guizot le dit expressément : « Le mariage prépare le gouvernement de la famille et amène l’ordre social ; il établit les premiers degrés de subordination nécessaire à le former. Le père est le chef par la force ; la mère, la médiatrice par la douceur et la persuasion ; les enfants sont les sujets et deviennent chefs à leur tour ; voilà le type de tous les gouvernements ». C’est ainsi que les femmes entrent dans les nouveaux rapports sociaux liés à l’émergence du capitalisme dans une situation d’infériorité. La domination qu’elles subissent est d’abord confortée et ne peut s’améliorer que lentement. La condition féminine demeure hors du champ d’influence des droits de l’homme. La tentative d’Olympe de Gouges est restée isolée et sans suite (elle se conjuguait d’ailleurs avec une défense du système censitaire, d’aristocratie des riches qui excluait les pauvres et donc les femmes pauvres et supprimait les assemblées primaires mixtes de 1789 dans lesquelles les femmes « chef de foyer » avaient le droit de vote).

Au vingtième siècle, on connaît l’effet qu’ont eu les guerres sur la division sociale du travail et l’ensemble des rapports sociaux et comment cela s’est traduit par de difficiles avancées dans la condition féminine. Toutefois, en France, ce n’est que le préambule de la Constitution de 1946 qui pose le principe de l’égalité de droit entre hommes et femmes. Ainsi, l’évolution des rapports sociaux de sexe au cours de l’histoire montre qu’il garde des traces de l’ancien mode de rapports de classe quand celui-ci a évolué et est passé du féodalisme au capitalisme. De là, on peut supposer que le passage à une société sans classe n’impliquerait pas une modification consécutive des rapports sociaux de sexe. Ils retrouveraient leur autonomie mais il resterait à la faire vivre.

Moeurs attaque

image 1Je disais dans mon précédent article que la théorie du genre diffusée à Paris 8 dans le cadre du « festival mœurs attaque » me paraissait relativement modérée. Je me vois obligé de revenir sur cette appréciation après avoir pris connaissance de la plaquette diffusée à cette occasion.

Il s’agit d’un petit cahier composé d’une dizaine de feuilles. Il est intitulé « c’est quoi mon genre ». Il se présente comme un écrit personnel, une sorte de confession. Celle qui l’a rédigé déclare vouloir se raconter « sans autre forme de justification ». Le premier article a pour titre « Ma vie est politique ». Il raconte les premiers pas dans la vie et plus particulièrement dans la vie sexuelle d’une jeune femme qui prend conscience que ce qu’elle vit n’est pas seulement personnel mais politique au sens de collectif et induit par ce qu’elle appelle « un système normatif » qu’elle résume ainsi : « domination masculine, patriarcat, rôles genrés ». Cette  prise de conscience n’est pas immédiate mais suit une psychothérapie inutile car, dit l’auteur : « elle n’a fait qu’ancrer, un peu plus en moi l’idée selon laquelle j’étais une « femme » et que je ne pourrais échapper à ce que l’on attendait généralement de ces dernières ». Cet échec est surmonté par la découverte de la pensée de Monique Wittig (dont on peut avoir un aperçu dans mes articles Facebook du 31/01 et 01/02 intitulés « l’offensive de la théorie du genre » 3 et 4) (repris le 01/06/2014). Par-là l’auteur passe donc de la découverte du genre, comme « sexe social » c’est-à-dire /comme construction culturelle et sociale, à la remise en cause globale des rôles sociaux sexués et des institutions qui leur sont liées comme « le couple ». Elle accède ainsi douloureusement à « l’idée de la non-exclusivité ». Elle apprend « à connaitre et à apprécier cette idée, synonyme à présent de liberté, d’autonomie et de non-enfermement ». Autrement dit après avoir diagnostiqué une domination déterminée socialement, elle n’en reste pas moins sur le plan de sa personne, de son vécu. A un problème, qu’elle déclare politique, elle propose une solution purement individuelle. Elle propose tout au plus de partager cette expérience, d’en discuter car ce serait le « seul et unique moyen de réellement mettre en œuvre un changement profond de nos manières d’être et de relationner ensemble« .

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Tout cela donc est bien innocent et ne va pas bien loin. Cela n’exige aucune évolution du droit, aucune mise en œuvre d’une égalité dans le travail ou le partage du pouvoir, bref cela en reste à l’interpersonnel et au sociétal. Suit d’ailleurs un petit article, apparemment de la même main (si je puis dire), qui relate une expérience de masturbation. Je ne sais comment cela a été pensé mais cela fonctionne comme  l’auto-caricature de la solution apportée à la « domination masculine ». On peut même y voir un discret retour de l’idée que le sexe n’est tout de même pas que socialement construit sous la forme de l’évocation de « l’ordre impérieux et urgent de l’envie sexuelle » et de « l’appel urgent » de la chair !

Là où les choses prennent une autre tournure qui n’autorise plus le qualificatif de modéré, c’est dans l’article suivant, rédigé en anglais mais semble-t-il au moins cautionné par l’auteur. Ici ma technique de lecture par la fin est presque inutile tant la chose est énorme !

L’article se termine par trois propositions « to change the future of gender and sexuel definitions » : la première est de se passer de la sexualité reproductive en recourant au clonage ce qui rendrait inutile l’hétérosexualité. La seconde serait d’en finir avec les identités imposées en permettant à chacun de choisir une identité comme on se choisit un avatar dans le cybermonde. La troisième, considérée comme « on a more pragmatic level » consiste à changer notre langage (ce qui était effectivement une proposition et un essai de Monique Wittig).

Clairement, on est passé de la libération individuelle plus ou  moins fantasmée au pur délire. Cela rappelle les délires dans un tout autre registre des gauchistes (surtout des maoïstes) des années soixante-dix. Ils faisaient effectivement suivre leurs diatribes contre l’exploitation capitaliste d’appels au lynchage tantôt contre les organisations syndicales ouvrières ou étudiantes ou contre un malheureux notaire de province condamné selon eux par un prétendu tribunal populaire. Il s’agissait d’importer en France les méthodes et les excès de la révolution culturelle chinoise sur laquelle tous les fantasmes paraissaient permis.

image 2Après cela il parait presque inutile de remonter en arrière pour voir quel cheminement a pu aboutir à ces propositions tout autant et tout aussi heureusement destinées à rester sans effets que celles des maoïstes. Disons néanmoins pour être court que la découverte qui permet cet aboutissement consiste principalement à soutenir que le capitalisme, qui repose sur la propriété privée, s’est développé en réprimant les formes de sexualité alternative. Selon l’auteur c’est la nécessité de transmettre la propriété qui serait à l’origine de « l’hétérosexualité obligatoire ». Il importe peu ici que la propriété privée ait précédé de très loin le développement du capitalisme. Il suffit que cela justifie les tentatives de subvertir la dualité du genre (homme/femme ; masculin/féminin) en proposant une autre classification. On apprend qu’une penseuse de cette affaire (Anne Fausto-Sterling) propose une classification en cinq genres. Une autre fait mieux et propose « 343 shades of gender ».

Il ne me semble pas utile de remonter plus loin pour voir tous les glissements qui permettent d’aboutir à tout cela. Notons seulement le passage obligé par la négation pure et simple de la différence des sexes avec la reprise de la théorie de Monique Wittig selon laquelle « there are no « male » and no « female ». Those concepts are part of a whole ideology that she defines as the straight mind« . Ce qui est clair pour moi c’est que, comme dans les années soixante-dix avec le gauchisme, la jeunesse est plus que jamais invitée à aller voir ailleurs, à perdre ses forces et son énergie dans des combats dont la première vertu est de ne rien changer au niveau social (ce qui ne les empêchera pas de pouvoir être destructeurs pour certaines et certains au niveau de leur vie personnelle). La persévérance dans l’effort pour égarer la jeunesse éduquée me parait tout à fait admirable dans sa capacité à innover et à inventer de nouveaux délires, de nouvelles folies et de nouveaux jeux de dupes !

Bourdieu et la théorie du genre (2)

L’enfermement dans le système de la sociodicée ne permet pas à Bourdieu d’en expliquer la constitution : d’où l’idée d’anamnèse (une connaissance à la fois possédée et perdue) et d’inconscient spécifique. Il écrit : « [cette anamnèse] porte sur la phylogenèse et l’ontogenèse d’un inconscient à la fois collectif et individuel, trace incorporée d’une histoire collective et d’une histoire individuelle qui impose à tous les agents, hommes et femmes, son système de présupposés impératifs » (page 62). Cet inconscient une fois postulé, il suffit de considérer qu’il s’exprime plus ou moins fortement selon les sociétés et les positions occupées dans l’espace social pour rendre compte de la variété de la situation des femmes dans les sociétés et à différentes périodes de l’histoire. L’explication par des facteurs sociaux et économiques peut alors être réintroduite sans être développée dans la mesure où elle est considérée d’emblée comme secondaire, voire superfétatoire. Le sociologue Bourdieu récuse l’explication sociologique ! Il lui substitue quelques interprétations dignes des docteurs de Molière, comme : « L’illusio originaire, qui est constitutive de la masculanité, est sans doute au fondement de la libido dominandi sous les formes spécifiques qu’elle revêt dans les différents champs » (page 82). Plus sérieusement, il développe l’idée d’une vision « dispositionnaliste » : c’est en fait l’idée assez banale que les stratégies amoureuses et matrimoniales sont le « moyen privilégié d’acquérir une position sociale » et plus généralement que le « calcul de l’intérêt bien compris » n’est jamais absent de la relation entre les sexes mais qu’il est masqué sous l’apparence « d’une forme de rationalité qui ne doit rien au calcul rationnel ». Ce qui est calcul se présente comme l’expression de dispositions de caractère, de la disposition à admirer, à respecter, à aimer : les raisons du cœur qui font qu’on est tout disposé à accepter ou même souhaiter ce que le destin social nous impose.

Reste que postuler un inconscient « à la fois collectif et individuel » nécessite de spécifier le contenu et le mode d’expression de cet inconscient. C’est ici que Bourdieu développe l’idée de « violence symbolique ». Cette violence s’exprime à travers les relations de pouvoir dans lesquelles sont pris aussi bien les hommes que les femmes. Elle s’appuie sur des représentations partagées qui apparaissent comme naturelles mais qui font que les femmes aussi bien que les hommes se font violence à eux-mêmes pour correspondre à des modèles attendus de féminité ou de virilité. Elle s’exerce « à travers des schèmes de perception, d’appréciation et d’action » qui contrôlent la volonté. Cette violence est incorporée quand le dominé (mais surtout la dominée puisque la domination porte d’abord sur les femmes et le corps des femmes) ne dispose pour penser sa situation que « des instruments de connaissance qu’il a en commun » avec le dominant. La dominée est ainsi conduite à se faire une représentation négative d’elle-même et à l’intégrer dans ses façons d’être (de marcher, de porter le regard, de s’exprimer etc.). Elle a le sentiment de sa propre insignifiance, sentiment d’autant plus fort qu’il est confirmé par sa situation effective.

« Il est tout à fait illusoire de croire que la violence symbolique peut être vaincue par les seules armes de la conscience et de la volonté » car elle est l’expression d’un « pouvoir symbolique » qui s’inscrit dans « des structures objectives ». Elle ne peut être renversée que par « une transformation radicale des conditions sociales de production des dispositions ». On pourrait croire que Bourdieu revient par ce détour à un réalisme politique et sociologique qui serait selon son expression en rupture avec « la révolution symbolique qu’appelle le mouvement féministe ». Seulement, il semble avoir principalement en vue ce qu’il appelle « la structure d’un marché des biens symboliques dont la loi fondamentale est que les femmes y sont traités comme des objets qui circulent de bas en haut ». Ce « marché symbolique » est « le terrain des échanges symboliques, des rapports de production et de reproduction du capital symbolique ». Ce marché s’inscrit dans un « mode de production symbolique ». On a visiblement ici un décalque des concepts marxistes. La valeur capitalisée est « l’honneur ». Les femmes sont les « signes fiduciaires », « elles sont réduites au statut d’instruments de production ou de reproduction du capital symbolique et social ». Bourdieu veut ainsi se démarquer de la vision, selon lui purement économiste, du marxisme « confondant la logique du mode de production symbolique avec la logique d’un mode de production proprement économique ». Sa critique est un peu curieuse puisque c’est lui-même qui opère le décalque de l’un à l’autre. Ce qui est clair, c’est que sa reprise de la théorie du genre la maintient dans le cadre de l’idéalisme philosophique.

Bourdieu et la théorie du genre

image 1La théorie du genre prend chez Pierre Bourdieu une allure particulière. On peut la résumer par cette phrase extraite de son livre « la domination masculine » (page 29) : « Loin que les nécessités de la reproduction biologique déterminent l’organisation symbolique de la division sexuelle du travail, et de proche en proche, de tout l’ordre naturel et social, c’est une construction arbitraire du biologique, et en particulier du corps, masculin et féminin, de ses usages et de ses fonctions, notamment dans la reproduction biologique, qui donne un fondement en apparence naturel à la vision androcentrique de la division du travail sexuel et de la division sexuelle du travail et, par-là, de tout le cosmos ».

Cette phrase commence par une négation. Elle veut opérer un renversement. Si je la réduis cela donne : les nécessités biologiques sexuelles ne sont pas déterminantes socialement. A l’inverse, c’est une « construction arbitraire du biologique » qui façonne les usages du corps aussi bien dans les rapports sexuels que dans le partage des tâches sociales entre les sexes, et qui à partir de là influe sur toutes les représentations« .

La première proposition pose déjà un petit problème. Même si cela aurait mérité d’être un peu argumenté, il semble assez raisonnable de penser qu’il y a trop de médiations entre le biologique et le social pour qu’on puisse postuler un déterminisme de l’un sur l’autre. Mais, si je remplace le verbe déterminer par celui d’orienter, il ne parait pas impossible d’envisager que le biologique oriente le social. Par exemple, il parait raisonnable de supposer que l’agressivité et la force physique ont une relation avec les secrétions d’hormones mâles, que ces dispositions physiques et comportementales sont la raison pour laquelle, dans toutes les sociétés, la chasse au gros gibier et la guerre avec leur corolaire (l’usage d’armes létales) sont l’apanage du sexe masculin. Avec le verbe « déterminer » on interdit qu’une femme comme Calamity Jane puisse exister, avec celui d’ « orienter » on en fait une exception, et on est du coup plus près de la réalité. Ainsi, le sens global de la proposition reste acceptable, même si nous sommes tentés de lui apporter une atténuation.

La seconde proposition contenue dans la phrase de Pierre Bourdieu ne peut pas être traitée de la même manière.  Elle pose toute suite un problème : elle abandonne l’idée de terminisme pour passer à celle de « donner un fondement » ce qui est, en fait, à peu près l’équivalent de ce que nous avions à l’esprit avec le verbe « orienter ». On voit tout de suite que si la première proposition avait été que le biologique oriente le social, il aurait été possible d’envisager que le social puisse avoir un effet en retour sur le biologique. On aurait pu dire, par exemple, que l’éducation différente selon les sexes favorise et développe le fond d’agressivité naturelle des petits garçons alors qu’elle apprend la douceur et l’obéissance aux petites filles. Il y aurait eu une dialectique du biologique et du social, un effet d’impulsion et de retour. C’est ce que Pierre Bourdieu semble avoir voulu éviter  car, selon ce qu’il écrit, cela n’aurait été qu’une apparence. Or, c’est cette apparence qu’il veut renverser et qu’il combat.

Puisqu’il ne veut pas expliquer la domination par l’effet de renforcement par le social d’une orientation donnée par le biologique, il lui faut un agent qui se substitue au biologique et qui, non seulement en annule les effets, mais le fait être ce qu’il est. Cet agent c’est une « construction arbitraire du biologique ». Mais, qu’est-ce qu’une « construction arbitraire du biologique » ? Si on a lu ce qui précédait dans le livre, on sait que Bourdieu écartait ce que d’autres penseurs imputaient à « des facteurs ressortissant de la représentation plus ou moins consciente et intentionnelle (« idéologie », « discours », etc.) ». Il avançait l’idée de « schèmes de pensée d’application universelle ». Il s’agit donc de quelque chose qui est commun à toute l’humanité (« universel ») sans être naturel, quelque chose qui n’est  pas forgé par la conscience. Bourdieu l’appelle une « sociodicée » c’est-à-dire une justification théorique générale sur le modèle de la théodicée de Leibniz.  La question se pose alors de comprendre comment se forge cette sociodicée, d’où elle vient? Mais le mot « arbitraire » interdit ce questionnement.  En disant que c’est arbitraire Bourdieu se refuse à en imaginer la genèse, l’élaboration, les déterminations. C’est par conséquent une « construction » sans constructeur, qu’on peut décrire et analyser mais dont on ne peut connaitre le mode de formation et d’action. Bourdieu transporte la dialectique dans la sociodicée sous la forme d’un redoublement d’effet. Il écrit : « Elle légitime une relation de domination en l’inscrivant dans une nature biologique qui est elle-même une construction sociale généralisée ». En clair la domination masculine s’auto-légitime en s’inscrivant dans le biologique qui la justifie.

L’explication tourne court. Elle est enfermée dans le système de la sociodicée. Bourdieu évoque la psychanalyse et son idée de l’enfant comme « pervers polymorphe » mais sans l’exploiter alors que Judith Butler et la théorie du genre dominante s’y engouffrent pour remettre en cause  « l’hétérosexualité obligatoire » et en faire la première production « discursive » (puisque selon elle le genre est le produit d’un discours). Bourdieu évite ainsi les excès de la théorie du genre tout en l’adoptant sur le fond, c’est-à-dire sur sa forme fondamentale d’explication idéaliste (au sens philosophique).